A Plaisance, je logeais chez un négociant retiré des affaires depuis dix ans; après avoir voyagé en France et en Angleterre, il était revenu dans sa ville natale cosacrer son tems à l'éducation de sa famille. Je l'avais connu assez intimement à Paris, chez le chevalier Angiolini, alors envoyé de Toscane en France, celui qui, par parenthèse, rendit au prince Borghèse le mauvais service de lui faire épouser la jolie veuve du général Leclerc. Mon hote me connaissait assez pour ne point se gener avec moi, et il ne cessait de me dire combien il eut été facile au gouvernement français de se concilier l'affection des Italiens, si, en brisant tous leurs usages, on ne leur avait pas imposé le joug des lois françaises. En un mot, c'était un des hommes les plus prononcés contre Napoléon, bien qu'il rendit justice à ses grands talens militaires et aux bonnes qualités de notre nation. "Nous étions si heureux! me répétait il souvent; aujourd'hui nous payons trois fois autant de contributions qu'autrefois; non-seulement la conscription nous enlève nos enfans quand ils ont vingt ans, mais sous le perfide prétexte de leur donner une éducation français dans les lycées, on prend ceux des gens riches avant qu'ils aient atteint leur douxième année, et toutes vos autorités donnent à cette indigne vexation le titre de bienfait. J'admirerai tout ce que vous voudrez, mais rien ne me fera aimer un gouvernement qui veut exercer son influence jusque dans l'intérieur des familles, et prescrire aux parens comment il doivent élever leurs enfans. Tenez, ajouta-t-il, ce qui a comblé la mesure dans ce pays, c'est d'y avoir rétabli la peine de mort, peine atroce qui ne préviènt aucun crime, puisque les crimes augmentent toujours en raison directe de la cruauté des supplices; le peuple se familiarise avec un horrible spectacle qui lui fait perdre tout ce qui lui reste de candeur dans les moeurs.
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