Wednesday, May 20, 2009

from Voyage d'un musicien en Italie par Auguste-Louis Blondeau, 1809-1812


En sortant de Lodi, on traverse Sicogliano (sic), village insignifiant, et en suite le Po, l'Eridan de la fable. On traverse cette rivière sur un barque; là finit le Milanais. A l'autre rive commence le duchè de Plaisance. A la sortie du royaume d'Italie, il faut exhiber son passeport et subir les visites vexatoires des douaniers. A très peu de distance du Po est la jolie ville de Plaisance, capitale de la principauté du meme nom, ville entourée de murailles, défendue par une citadelle, ornée de beaux édifices, peuplée de plus de vingt-cinq mille ames, située dans une belle position, grande, bien batie, et pourtant d'un aspect qui me parut triste dans l'intérieur. Je n'eus, à la vérité, qu'une soirée pour l'examiner; j'y dinai et j'y passai la nuit, c'est trop peu pour juger une localité quelconque, aussi je me borne simplement à rapporter l'impression qui me resta après ce court séjour. Cet état, ainsi que celui de Parme, faisait partie de l'Empire français et les douanes s'y exerçaient avec une sévérité presque sauvage: on avait plutot l'air d'etre dévalisé que visité par les cercères qui en gardaient les portes. La grand place de Plaisance est carrée, dallée en pierre dure. Elle a deux façades principales, l'une, batie en brique du genre le plus gothique et ayant cinq grandes arcades pour entrées; en avant de cette façade sont deux chevaux de bronze sur de hauts piédestaux et portant chacun un cavalier de grandeur colossale. L'autre coté, qui est parallèle, est dans un gout plus moderne et n'est pas moins beau, quoique plus simple d'ornements. J'ai remarqué un curieux méridien sur cette place qu'il parcourt dans toute son étendue; il est en cuivre et fixé sur le pavé. Je n'ai pu voir les églises, que l'on m'a dit fort remarquables, mais j'ai vu la salle de spectacle qui est grande et assez belle. J'y vis représenter un drame atroce, dont j'ai oublié le nom, ce que je regrette peu, mais que je fus obligé d'écouter debout, attendu que dans la plus grande partie des salles de spectacles d'Italie, à cette époque, plus de la moitié du parterre était totalment dépourvue de sièges, ce qui me contrariait beaucoup. Je dois dire en passant que le meilleur fromage que l'on consomme en si grande quantité sous le nom de parmesan, se fabrique à Plaisance, d'où il se répand dans le commerce et dans l'Europe.

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